Cape qu’elle resserre autour de son corps, elle baisse les yeux en espérant ne croiser personne susceptible de la reconnaître. Elle avait pris toutes ses précautions Ophelia, passant par un passage secret qu’elle était supposée être la seule à connaître et décidant de partir au beau milieu de la nuit. Elle savait que ce n’était sans doute pas raisonnable et qu’elle ne devrait pas agir comme elle le faisait, mais la partie rationnelle de son esprit s’était tue, laissant ses émotions l’envahir et prendre le pas sur la logique qu’elle choisissait habituellement. Tout était de la faute de ces stupides rumeurs entendues deux jours plus tôt, celles qu’elle avait réussi à ignorer quelques heures seulement avant qu’elles ne viennent le hanter et la tourmenter. Ils étaient revenus. Sans prévenir, sans qu’on ne sache d’où ils venaient exactement, ils étaient tous revenus, sans exception. C’était les mots lancés par une de leur chasseuse, revenue avec ces informations qu’elle jurait comme étant exactes. Son cœur s’était gonflée d’espoir alors qu’elle n’avait fait que penser à ceux qui lui avaient été si injustement arrachés. Cette nuit là, elle s’était endormie avec la photo de Theodore, Leo et elle contre son cœur, en se jurant que si cette rumeur était vraie, alors elle fera le nécessaire pour les retrouver. Qu’importe si elle devait abandonner ses responsabilités, qu’importe le danger qu’elle devra affronter. Il était hors de question d’attendre les bras croisés, ce qui fut pourtant la conclusion tirée du conseil qui avait eu lieu l’après-midi même. En dehors d’elle-même et de deux autres sorcières, l’ensemble du conseil avait voté pour la méfiance, volonté de préserver ce qu’elles avaient si durement construit. Elle comprend, Ophelia, elle comprend même mieux que quiconque quand elle se souvient encore des débuts, quand elles n’avaient rien, quand elles se retrouvaient menacées par des hommes désireux de profiter de la situation. Seulement, la méfiance qu’elle choisissait habituellement était passée au second plan dès lors que la possibilité de retrouver son jumeau et son meilleur ami avait germé dans son esprit. Les arguments qu’elle avait avancé n’avaient pas servi. Elles avaient choisi d’attendre, de voir comment les choses se dérouleront pour pouvoir préserver leur communauté à l’abri. A peine était-elle partie de la grande salle où ces réunions avaient eu lieu qu’elle savait, la sorcière, qu’elle partirait le soir-même. Il était hors de question qu’elle n’attende, qu’elle ne laisse ses proches souffrir de ce qu’était devenu leur monde. Leur clan sera plus que capable de se débrouiller sans elle, de toute façon. Chacun avait son rôle, sa place, et surtout, chacun était prêt à faire face à l’éventualité de voir l’une d’elles disparaître. Ce monde était suffisamment dangereux pour qu’elles ne se préparent à tout, alors son absence ne sera pas si terrible que ça. Elle avait laissé une lettre sur son lit, expliquant qu’elle reviendra quand elle aura trouvé son jumeau et son meilleur ami – ou alors, si cette rumeur s’avérait être fausse. Le sac sur son dos contenait quelques affaires, de quoi lui permettre de tenir les premiers jours. Elle se débrouillera pour le reste, consciente que se promener avec trop de biens attirerait l’attention. Elle n’était que trop consciente des dangers qu’elle encourrait en partant comme elle le faisait, en se déplaçant seule et c’était pour cette raison qu’elle avait une dague dissimulée dans sa manche, prête à la dégainer s’il le fallait, si elle ressentait la moindre menace s’approcher. Ophelia ne comptait pas courir le moindre risque alors qu’à deux reprises, ces dernières semaines, on avait tenté de s’en prendre à elle pour des histoires de territoire. Un soupir quitte ses lèvres alors qu’elle n’est plus qu’à quelques rues de la sortie du clan. Une fois qu’elle aura franchi les grandes portes, alors elle aura franchi la première étape de ce plan qui, elle devait l’admettre, n’était pas si élaborée que ça. Seulement, elle disposait de peu d’informations et était convaincue que sa détermination lui permettra de retrouver ses proches. Elle en avait besoin, la sorcière, espoir qu’elle pourrait alors combler le vide qui s’était creusé avec leur disparition, celui qu’elle avait tenté d’éloigner en s’occupant de cette communauté qu’elle avait aidé à grandir.

La brune a pourtant cette drôle d’impression qui ne la quitte pas depuis quelques minutes déjà. Elle n’est pas seule, ce qui la pousse à prendre plusieurs détours. Quand cette sensation ne la quitte pas, qu’elle pense apercevoir une ombre pas très loin d’elle, elle comprend alors qu’elle est suivie. Peu à peu, Ophelia ralentit. Elle fait glisser sa dague le long de son bras pour venir s’emparer du manche et quand il lui semble être proche de la personne la suivant, elle fait brusquement demi-tour, tendant le bras suffisamment haut pour que sa dague ne parvienne à la gorge de son adversaire. Son regard en croise un autre, familier, sourcils qu’elle fronce quand elle réalise de qui il s’agissait. « Noah ? Qu’est-ce que fais là ? » Il ne lui faut que quelques secondes pour comprendre, se doutant sans doute qu’il la suivait depuis qu’elle avait quitté la chambre qu’elle occupait. Elle serre la mâchoire, regard noir qu’elle lui adresse alors. « Tu n’étais pas obligée de me suivre. Je me débrouille très bien seule et je n’ai certainement pas besoin de toi. » Elle finit par baisser le bras car si Noah était beaucoup de choses, il n’était pas une menace pour elle et ne l’avait jamais été. Au contraire – le conseil avait jugé bon de lui attribuer le sorcier comme garde du corps, ce qui l’avait profondément agacée. L’idée même d’avoir un garde du corps chargé de surveiller le moindre de ses faits et gestes l’agaçait, le fait qu’il s’agisse d’un homme était encore pire à ses yeux. Les justifications données par le conseil avaient été logiques pourtant – par deux fois, il lui avait sauvé la vie alors qu’on avait tenté de s’en prendre à elle. Ophelia aurait du le remercier, lui rendre la tâche facile sans doute en se montrant moins hostile envers lui, mais elle considérait cette situation comme étant un véritable échec. Soupirant, elle fait un pas en arrière, déjà prête à partir mais elle voit alors qu’il cherche à la suivre. « Si tu t’imagines un instant que je compte rentrer, tu as tout faux. » Et qu’importe ce qu’elle devra faire pour parvenir à quitter la ville, il était hors de question de se laisser faire, de le laisser la ramener dans cette grande demeure où habitaient les membres du conseil. « Je m’en vais. Je compte bien retrouver Leo et Theo, et tu ne peux rien faire pour m’arrêter. » Elle garde la tête haute, Ophelia, flammes brûlant dans ses iris et trahissant aisément sa détermination. Rien ne pourra l’empêcher de retrouver son frère et son meilleur ami, et si elle devait tout brûler sur son passage pour y arriver, elle le fera sans hésiter. Elle refuse l’éventualité qu’ils aient disparu autrement, qu’ils soient morts alors qu’elle s’était remise à espérer à peine deux jours plus tôt. Même si elle n’avait aucune preuve, qu’elle ne savait pas où les trouver, elle était prête à retourner chaque centimètre carré du Royaume Uni jusqu’à trouver le moindre indice. « Alors tu peux t’écarter et me laisser passer pour que je puisse y aller tranquillement. Ou alors… Tu peux essayer de m’en empêcher et voir combien de secondes suffiront à ce que je te rende incapable de me suivre. » Ce qui était une menace sans doute présomptueuse de sa part. Ophelia avait appris à se défendre et à attaquer de manière efficace mais elle savait que Noah aurait l’avantage, en cas de réel affrontement. Seulement, elle osait espérer que ses mots suffiraient à se débarrasser de lui, à lui faire comprendre que rien ne saurait la détourner de son objectif.

Son adversaire au sol, inapte à bouger après le dernier coup envoyé par Noah, le sorcier à terre tendit la main pour que son assaillant l’aide à se relever et c’est ce qu’il fit, un peu trop rapidement, un peu trop abruptement pour le bien-être de son camarade. Sourire qui n’atteignit pas ses lèvres pour mimer celui de Zacharias comme cela aurait pu l’être des années avant, l’ancien blaireau se contenta d’un « C’était nul, Smith, ressaisis-toi » sérieux, loin du garçon blagueur qu’il était alors avant tout ça. Il avait perdu son insouciance en même temps que ses amis, pensée pour Maisie disparue en même temps que la moitié de la population quand avec Connor, ils avaient été incapable de surmonter son absence. Frère de cœur que le monde avait déchiré par ses clans ennemis, il avait perdu sa raison de se battre pendant un temps, sa raison de survivre même alors que ses liens les plus précieux lui avaient été enlevés. On lui avait arraché sa plus grande qualité en lui empêchant d’être loyal à celui qu’il avait toujours connu, toujours aimé comme le seul membre de famille avec la Fortescue et aujourd’hui, leurs prénoms lui étaient devenus douloureux à l’oreille ; palpitant cinglant dans sa poitrine dès lors qu’on lui évoquait le passé, dès lors que le visage de ses deux proches se matérialisait dans son esprit pour le hanter, le torturer psychologiquement comme c’était actuellement le cas. Le corps tremblant, il relâcha le sorcier qui sortit de la pièce sans demander son reste et il reprit l’entraînement Noah, encore, jusqu’à ce qu’ils disparaissent de sa tête, de la même façon qu’ils avaient disparus de sa vie au cours des dernières années. Sac de frappe contre lequel reposa son crâne pendant une seconde, ou deux, il ne perdait pas de vue son objectif, le brun, et cette mission qui était sienne depuis plusieurs semaines maintenant, ou peut-être des mois. Le temps passait sans qu’aucun d’eux ne s’en rende réellement compte et il était même impossible pour lui de dire depuis quand exactement, une partie du monde s’était évaporé par magie. Une que personne ne comprenait, encore aujourd’hui, raison pour laquelle il n’avait pas cru aux rumeurs pendant la réunion quelques jours plus tôt. C’était insensé, qu’après tout ce temps et toutes les recherches effectuées, les disparus soient réapparus de la même manière qu’ils étaient partis. Il n’en croyait rien parce que des informations de ce genre, il en avait entendu quotidiennement depuis des années pourtant, il avait perçu cette petite lueur dans le regard de sa protégée, celle de l’espoir, oubliée il y a longtemps par Noah lui-même et il avait compris qu’elle agirait dans l’ombre qu’importe les mots qui étaient sortis de sa bouche ensuite. Il n’avait pas écouté, les yeux rivés sur elle, sur Ophelia, celle qui malgré elle lui avait apporté un nouvel objectif, un nouveau souffle de vie.

La garder en vie et plus que ça, la protéger contre les menaces extérieures était la fonction qu’on lui avait confiée et évidemment, il ne lui avait fallu que de poser les yeux sur elle pour accepter. La retrouver après toutes ces années avait été une surprise et tous les deux avaient rapidement – sans doute trop – retrouvés leurs vieux réflexes. Elle avait changé, la Burgess, à bien des égards mais il y voyait encore souvent la fille pour qui il avait craqué sans mal à l’époque, tout au moins s’il regardait bien. Parce qu’elle avait perdu autant que lui sinon plus dans cette guerre que tous se fatiguaient à nommer autrement mais lorsque clans et sorciers devenus soldats, véritables guerriers même, il n’y avait plus vraiment de questions à se poser. Alors tout droit sorti de son entraînement, il avait filé à la douche avant de reprendre son poste, certain qu’elle essaierait de leur échapper ce soir, de lui échapper. Et son instinct était le bon, il le savait, et ce pour la connaître un minimum. Ils se cherchaient encore constamment même si le brun n’était plus le même, plus grand, plus mature, plus professionnel ; leurs joutes verbales avaient le don de lui dessiner un sourire aussi mince était-il en ces temps difficiles. Soupir en la voyant sortir de sa chambre, caché derrière une alcôve pour ne pas qu’elle le voit, il pensa qu’il aurait préféré se tromper pour une fois parce que sa tenue et le petit sac dans son dos ne présageait rien de bon. Elle comptait partir pour plusieurs jours et il ne pouvait définitivement pas la laisser partir. C’était trop dangereux. S’il se convainquait aisément qu’il ne s’agissait que de son job, il y avait plus que ça. Noah suivit Ophelia dans les sous-sols et autres couloirs ; prêt à l’arrêter à tout moment avant qu’elle ne sorte de l’enceinte mais elle l’avait remarqué avant, il le réalisa à l’instant où sa dague se retrouva sous son menton, prêt à le blesser s’il fallait. Un sourire lui échappa, fierté dans le regard, parce qu’elle n’était pas une demoiselle sans défense contrairement à ce que d’autres semblaient penser. « Il serait plus légitime que je te demande ce que toi, tu fais là Ophelia » Elle n’avait pas le droit de sortir, pas sans protection et il était en charge de cette partie-là. « Bien sur que si, je suis obligé de te suivre puisque tu fais n’importe quoi » Et si le regard noir de la sorcière aurait pu l’arrêter avant, il n’en était plus rien aujourd’hui. « Vraiment ? Sans moi tu serais morte deux fois, rien que cette semaine » lui rappela t’il en fronçant les yeux, dureté au moment d’énoncer ce fait qui, même s’il ne le montrait pas, le touchait plus qu’il n’aurait dû. Sa sécurité lui importait plus que quiconque ; elle était la seule qui lui restait. Soulagé lorsqu’elle éloigna son arme de son visage, il ne cilla pas à ses prochains mots, habitué à les entendre, habitué à ce qu’elle remette en doute ses talents pour la protéger. Et il écouta son raisonnement sans pour autant y accorder une seconde pensée parce qu’il était tout simplement hors de question qu’elle s’en aille. « Tu ne vas pas partir, je te l’interdis » dit-il en secouant la tête, affirmation à laquelle il croyait fortement mais il avait conscience que son interdiction ne lui plairait pas. « Ce sont des conneries tout ça et tu le sais très bien » A quelques pas d’elle, il l’attrapa par le bras pour la rapprocher de lui, pour qu’elle l’écoute. « Ce n’est pas la première fois qu’on entend ce genre de rumeurs Ophelia, tant qu’il n’y a pas d’annonce officielle, tu ne peux pas prendre le risque de sortir » Il serra son bras un peu plus, pas conscient qu’il puisse lui faire réellement mal à cet instant. « Je te rappelle qu’il y a des gens qui n’attendent que ça pour te tuer » Et il la relâcha subitement, bien que ça ne signifiait pas qu’il abandonnait la partie, loin de là. Il comptait bien la ramener à la raison même si ça prenait du temps. Il secoua la tête quand la sorcière essaya de le convaincre avec quelques paroles qui n’eurent aucun effet sur lui. « Je ne peux pas te laisser passer » Et pour appuyer ses propos, il se planta devant la seule sortie possible, faisant bouclier avec son corps. « J’suis désolé » Il l’était vraiment, Noah, qu’elle le croit ou non. « Tu sais que tes menaces ne me font plus peur depuis longtemps » se sentit-il obligé d’ajouter avec un petit sourire, espérant peut-être se servir de l’humour pour la soustraire à son opinion, à ses règles. Seulement elle était décidée, surement autant que lui, ce qui n’arrangerait rien à cette situation sans issue. « Je sais que tu es têtue, tu l’as toujours été. Tu n’as rien à me prouver de ce côté-là. Et… j’imagine à quel point ils te manquent – commença t’il en ravalant sa salive, peu fier d’utiliser ses émotions dans ce contexte – mais tu ne peux pas croire à cette histoire de retour. Pas comme ça, pas après autant d’années » Elle ne pouvait pas y croire parce que lui n’y croyait plus. Il se reprit avant de flancher, ses propres sentiments auxquels il n’accordait plus d’attention depuis qu’il s’était battu avec Connor. Ce souvenir qui mena à cette prochaine demande : « Ne m’oblige pas à employer la force avec toi Ophelia. S’il te plaît » Il ne suppliait jamais mais ça ne pouvait pas se produire à nouveau et encore moins avec elle.

Spoiler:

Elle essaye de se montrer distante, Ophelia, de prétendre que retrouver Noah après tout ce temps n’avait pas soulagé les maux de son cœur. C’était pourtant ce qui était arrivé, drôle de soulagement ressenti quand son visage lui était apparu pour la première fois et elle n’avait pas hésité un instant avant de se porter garante pour lui. C’était ainsi que fonctionner les choses chez eux – pour qu’un homme ne soit accepté, il fallait qu’une sorcière se porte garante afin d’éviter au maximum les problèmes comme ceux rencontrés au tout début. Ce qui pouvait apparaître comme étant une méfiance démesurée était en réalité une nécessité pour que chaque femme présente puisse se sentir à l’aise alors même que le monde extérieur leur était toujours hostile. Leur communauté n’était pas parfaite mais elle leur permettait de survivre sans sombrer, d’affronter chaque journée avec l’espoir que la suivante n’en sera que meilleure. Pourtant, ils étaient tous différents, parce qu’ils avaient trop enduré, qu’ils avaient trop perdu. Noah en était la preuve même. S’ils passaient leur temps à se chercher comme c’était déjà le cas autrefois, échanges qui parvenaient toujours à faire sourire la Burgess malgré elle, elle ne pouvait que remarquer comme il n’était plus le même. Elle ne retrouvait plus cet éclat pétillant qui brillait dans ses iris autrefois, cette légèreté qui n’apparaissait presque plus jamais dans le ton de sa voix. Au fond, elle aurait aimé pouvoir soulager ce qui le troublait tout en étant consciente qu’elle ne le pouvait pas. Elle-même avait changé, faisant preuve d’une sérieux que seul le sorcier parvenait à déstabiliser, parce qu’il y avait cette crainte qu’on ne s’en prenne à ce qu’elle avait construit avec d’autres, responsabilités trop lourdes qu’elle ne quittait jamais. Pourtant, ce soir, elle est prête à y renoncer à cause de rumeurs, à cause de cet espoir qui parvient à faire fondre la glace entourant son palpitant anesthésié. « Je ne fais pas n’importe quoi!» proteste-t-elle, n’appréciant pas cette façon qu’il avait de lui parler, comme s’il savait forcément ce qui était mieux pour elle. La vérité était qu’elle ne pensait pas à elle mais à eux, à son meilleur ami et à son jumeau, à cet espoir de les retrouver et de les empêcher de souffrir par la faute de ce monde nouveau. S’ils apparaissaient à nouveau, alors Ophelia ne pouvait qu’imaginer à quel point ils seront perdus – et à quel point il serait facile pour n’importe qui d’en profiter. Mâchoire serrée, elle soutient son regard quand bien même elle devait admettre qu’il visait juste. « Je serai vigilante. » Mais ça ne suffira peut-être pas, elle le sait. La vipère refuse pourtant de renoncer, prête à tous les risques pour retrouver sa moitié. Arquant un sourcil, c’est tout son être qui s’enflamme parce qu’il veut lui interdire de sortir, interdiction qu’elle n’a jamais appréciée, encore moins quand elle vient d’un homme. « Parce que tu penses pouvoir m’interdire quoi que ce soit ? » Le ton monte, bras attrapé par Noah qui l’attire à lui. Elle refuse d’écouter, refuse même d’imaginer que les rumeurs entendues soient fausses. Il serre plus fort son bras et Ophelia tire pour le récupérer. « Noah.. » C’est son regard qui l’empêche de protester plus encore, désespoir qu’elle lit et qui semble faire écho au sien d’une différente façon. Elle comprend alors, qu’il s’inquiète pour elle, au-delà du statut qu’on lui avait offert, au-delà de la simple protection qu’il devait assurer. D’autres auraient sans doute déjà abandonné face à sa force de caractère mais pas lui – lui continuait à veiller sur elle, encore et encore, même quand elle n’en faisait qu’à sa tête et qu’elle se mettait en danger, même quand elle le provoquait par frustration de le voir aussi obstiné. Il était là, Noah, il l’était toujours, et cette pensée suffit à étreindre son cœur d’une douce chaleur.

Noah qui bloque la seule sortie possible, frustration éveillée chez la sorcière qui n’a plus d’autre option possible. « Tu ne peux pas ou tu ne veux pas ? » Ce qui n’était pas tout à fait pareil aux yeux de la brune qui s’impatiente, qui voit la possibilité de retrouver les siens s’éloigner au fil des secondes qui s’écoulent. Elle baisse les yeux l’espace de quelques secondes car il est loin de la vérité, Noah, qu’il n’imagine pas ce que c’est que d’avoir chaque jour l’impression que quelque chose lui manque. Peut-être que si finalement – lui même avait beaucoup perdu – mais elle refusait d’y penser, déjà incapable de gérer son propre chagrin. La supplication entendue dans sa voix suffit à ce qu’elle ne relève les yeux vers lui et elle n’aime pas ce qu’elle y lit, Ophelia, n’aime pas être dans une situation qui pourrait la pousser à lui faire du mal quand ce n’était pas ce qu’elle souhaitait. « On m’a arraché une partie de moi il y a cinq ans. S’il y a la moindre chance de retrouver Leo et Theo, je me dois de vérifier. » Elle tente de ne pas faillir quand une part d’elle pourrait se laisser aller à renoncer juste pour ne plus avoir à se confronter à cette lueur qui brillait dans les iris du garde. « Tu l’as dit, tu sais que je suis têtue. Je vais essayer, encore et encore, et je vais finir par réussir car tu ne pourras pas toujours être là. » Et le garde qui prenait le relai quand Noah n’était pas là était nettement moins attentif – elle ignorait si c’était parce qu’il était moins talentueux ou si l’affect tenait une place dans ces faits et elle préfère ne pas y réfléchir. « Viens avec moi. » Les mots franchissent ses lèvres sans réfléchir et avant qu’elle ne puisse renoncer, qu’elle ne puisse réaliser ce qu’elle faisait, elle s’approche et attrape sa main dans la sienne. « Je ne compte pas parcourir tout le Royaume-Uni, je veux juste aller voir dans la grande ville la plus proche. S’il n’y a rien, je reviendrais. » Ils auront des informations, ils en auront forcément, il ne pouvait en être autrement. Son regard se relève vers Noah, vers cette proximité qu’elle avait imposé elle-même en s’approchant comme elle l’avait fait. « Viens avec moi et tu pourras t’assurer que rien n’arrive. Et.. Tu pourras savoir, toi aussi. » Car quand bien même il refusait cette possibilité, Ophelia était persuadée qu’une part de lui aimerait que ce soit vrai et c’est à cette partie qu’elle fait appel. Si elle tente de le manipuler d’une certaine façon, elle réalise à quel point finalement, elle apprécierait qu’il soit là, lui et pas un autre, le seul qu’elle voudrait accepter à ses côtés pour une telle expédition. « J’ai besoin de savoir. S’il te plaît. » Ses doigts qui enlacent les siens, le regard qu’elle accroche alors que le ton employé fait miroir à celui qu’il avait utilisé avec elle à peine quelques minutes plus tôt.

Il secoua la tête, Noah, face à sa protestation parce qu'elle avait beau dire ce qu'elle voulait, ce soir Ophelia faisait n'importe quoi. Elle s'apprêtait à sortir de ce domaine qui assurait sa sécurité depuis des mois, monde extérieur bien trop grand et brutal pour qu'elle s'en sorte indemne. Et il ne doutait pas de ses capacités à se battre, il l'avait vu à l'œuvre plusieurs fois lors de leurs entraînements, lui qui ne cessait de lui apprendre des nouveaux gestes, des nouveaux mouvements pour parfaire ses combats dans le cas où lui-même ne serait pas là pour le faire. S'il voulait croire qu'il y avait peu de chances pour que ça arrive, le sorcier savait également qu'il mettrait toujours tout en place pour la protéger et même y laisser sa vie s'il n'avait pas d'autres choix. Alors il lui faudrait des armes pour rester en vie, des techniques qui dépassaient parfois la magie quand bien même Noah avait également eu à s'informer et se laisser enseigner une magie plus sombre, plus dangereuse, de celle qu'adolescents à Poudlard il leur était impossible de connaître. Il n'était pas fier de réussir à invoquer des sortilèges puissants, capable même d'ôter la vie en quelques secondes, mais il ne semblait exister plus aucune limite dans ce nouveau monde qui était le leur et malheureusement, tous les moyens étaient bons et utiles pour survivre. Vie avec laquelle il avait plus d'une fois eu l'envie d'en finir parce que c'était trop dur, parce qu'il n'était alors pas encore le soldat surentraîné qu'il était aujourd'hui et qu'affronter son frère sur le champ de bataille avait été le summum de ce qu'il pouvait supporter, il lui avait fallut une force surhumaine pour décider de rester, de continuer, de garder l'espoir aussi de retrouver Maisie un jour. Ce fut cette pensée qui lui avait accéléré le coeur de longues minutes en lisant la même lueur dans le regard d'Ophelia puis il s'était rappelé sa mission principale et Noah avait refermé cette porte, celle derrière laquelle était représentée sa meilleure amie lui sautant dans les bras, l'étouffant dans une étreinte qui aurait fait couler les larmes qu'il pensait ne plus avoir, pour seulement se focaliser sur Ophelia. Elle était sa priorité et le resterait, qu'elle le veuille ou non - et c'était d'ailleurs plus souvent non. Comme ce non de la tête qu'il mima en l'entendant parler de vigilance ; il ne pouvait définitivement la laisser sortir. Et il accentua ce fait avec une vraie interdiction cette fois, sachant très bien qu'elle pouvait s'enflammer à tout instant pour avoir osé une telle chose mais pour une fois, il s'en moquait. Il se moquait de la décevoir, se moquait qu'elle le déteste pour la fin de ses jours du moment qu'elle était encore là pour le faire. « Je ne le pense pas, Ophelia, c'est ce que je suis en train de faire » Il ne donna aucune chance à une quelconque plaisanterie de s'installer, lui qui était pourtant un as de la connerie avant et opta pour la solution de force en utilisant son corps comme barrière pour l'empêcher de passer. Il ne savait pas si elle en ferait de même avec lui, si elle oserait user d'un sortilège jusqu'à engager un duel avec lui pour qu'il la laisse tranquille de faire ce qu'elle désirait et dans le fond, c'était peut-être ce qui lui faisait le plus peur. Parce que ce serait franchir une limite entre eux alors qu'il était certain, lui, de faire n'importe quoi y compris l'immobiliser avec sa baguette s'il le fallait pour la protéger. « Est-ce que ça change quelque chose ? » l'interrogea t'il en retour, peut-être pour gagner un peu de temps. Il lui répondit quand même un « Les deux » qui la pousserait sans doute à se poser des questions, si toutefois elle se le permettait sur le moment. Les prénoms prononcés le firent intérieurement grimacer, capacité à les dire quand lui s'en trouvait incapable depuis des années. Pour se préserver là où elle ne montrait que sa force et sa persévérance à vouloir les retrouver. « Tu peux aussi attendre quelques jours. Ils vont forcément envoyer une équipe ou deux sur le terrain pour vérifier... juste quelques jours Ophelia, c'est quoi, quelques jours après toutes ces années sans aucune piste valable ? » Ce n'était pas rien et il le savait, qu'elle retournerait ses mots contre lui mais encore une fois, il ne voyait que son job, Noah. Il ne voyait qu'elle. Il secoua encore la tête cependant, refusant d'accepter l'idée qu'elle puisse leur échapper pour un manque d'attention ou de compétence d'un autre de ses gardes. Il était l'un des meilleurs, ce n'était même pas de l'arrogance, c'était la vérité. Puis les mots sortirent de la bouche de la belle et sa main attrapa la sienne, suffisamment fort pour qu'il réagisse au geste et pose les yeux sur celles-ci, son coeur ratant un battement et se sentant idiot de réagir encore aussi facilement à son contact. Elle était sa force et sa faiblesse en même temps, Ophelia, et il y avait fort à parier qu'elle en avait totalement conscience. Il flancha l'espace de quelques secondes, ses protections mentales tombant légèrement tandis que son regard se releva à son adresse et qu'il se perdit dans ses nuances longtemps adorées. Elle continua à parler, la brunette, certainement parce qu'elle le sentait plus frêle, ses paroles entrant tout de même dans sa tête pour les assimiler et refuser, encore et encore, de lui donner raison, pas même quand elle insinua le fait qu'il pourrait en apprendre autant qu'elle sur la situation. Sur eux, les disparus. « Je ne veux pas savoir » rétorqua t'il instinctivement, telle une habitude, un mantra qu'il s'était répété au cours des dernières années. « Je ne veux pas... » Il allait le dire à nouveau, Noah, mais elle le stoppa avec sa supplication, similaire à la sienne qui, pourtant, lui laissa un goût amer dans la bouche. Leurs doigts entrelacés, il dut se faire violence pour ne pas craquer, le Anderson, là, tout de suite, et lui accorder toutes les faveurs qu'elle souhaitait juste parce qu'elle lui demandait, juste parce que c'était elle et qu'il y avait des sentiments qu'il n'admettait pas, mais il se détacha de son regard implorant, regrettant presque ce qui allait suivre. « Ne joue pas à ça avec moi, Ophe » Le surnom qui lui avait échappé dans un soupir quand ses iris se voulaient pourtant dures. « Ne joue pas avec mes émotions pour obtenir ce que tu veux, pas avec... NON. Ta vie et ta santé sont beaucoup plus importants que ça » Il en venait à douter de sa sincérité parce que si elle n'avait pas osé utiliser la manière forte en employant les grands moyens, elle ne se gênait pas pour jouer avec son coeur et c'était peut-être pire. « Je peux vivre avec l'idée que tu me détestes mais pas dans un monde où tu n'es plus là. Pas toi » Une déclaration qu'il n'avait pas prémédité et qui n'attendait aucune réponse finalement. Il lui faisait part d'un point, d'une vérité - la sienne - et il lâcha son regard ainsi que sa main avant de se reculer de la porte - non sans sortir sa baguette pour y apposer des sorts de protection puissants au cas où elle décidait quand même d'essayer une escapade. Passant les mains dans ses cheveux, il se retint de se les arracher en faisant les cent pas jusqu'à revenir vers la Burgess. « As-tu pensé au fait que peut-être, même s'ils réapparaissaient comme ça du jour au lendemain, ils ne seraient plus les mêmes personnes qu'on a connu ? Pensé au fait que peut-être, ils ne se souviendraient de rien, de nous ? Et qu'est-ce que tu ferais, si ton frère ne te reconnaissait pas ? » Et c'était contradictoire avec ce qu'il venait de lui avouer, le fait de la préférer vivante que tout autre chose mais il avait besoin de la retenir, Noah, de trouver quelque chose, n'importe quoi, pour l'empêcher de se mettre en danger. Surtout aussi qu'une part d'elle avait raison et que si elle lui demandait encore de l'accompagner, il finirait par dire oui.